Champ Vallon

Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Jacques | GERAUD

Saint-Simon invite le directeur du cirque Zavatta à venir réjouir le Roi. Verlaine contacte un avocat pour se marier avec Rimbaud, jeune poète. Rimbaud, négociant en Abyssinie, demande à Madame Desachy, agence matrimoniale, de lui convoyer des prétendantes. Céline et ce même Rimbaud voudraient dissuader leur mère de venir les voir, à Harar ou Bikobimbo. Gide révèle un secret à Mauriac, et Valéry à Gide. Proust informe maman d’un très gros pépin. Voltaire se plaint du facteur Besancenot …
18 lettres loufoques où l’on aura pris la plume de nos auteurs pour la faire déraper, dérailler, quitte à produire des accidents, drolatiques ou dramatiques, et même emporter ces messieurs, dont une dame (Duras), dans des aventures qui, à les lire, pourraient les laisser cois…

Jacques Géraud, Cher monsieur Zavatta, 2016, éditions Champ Vallon, collection Détours

Ces 47 microfictions viennent légender 47 images, presque toujours des photos, drôles, bizarres, souvent vintage, mais aussi quelques images pieuses et quelques tableaux. Ces légendes, donc, toujours décalées par rapport aux images qui les inspirent — vieilles bagnoles, femmes nues, hommes à chapeau ou à casquette —, les détournent du côté de la fantaisie et du fantastique. Les zigzags ou la guirlande de leur succession tracent la figure d’un parcours où se repèrent des thèmes qui sont des mythes de l’Occident : la Femme ; le Livre ; « Dieu » ou plus précisément le bon Jésus, traité sur le mode badin et puis, quelquefois, curieusement mystique…
Autant de fragments qui secrètement auraient de quoi s’agencer en un photoroman absolument insolite.

Après Proustites (P.O.L) et Petits proustillants (PUF), et pour le centenaire de la publication de Du côté de chez Swann, le narrateur-proustien reprend du service, pour un cycle d’historiettes ou de saynètes au nombre, érotiquement connoté, de 69 : kamasutra littéraire, dialectique fécondante de l’incomparable auteur de la Recherche et de celui de ce livre léger et singulier.
69 « additifs » à la Recherche, car un additif modifie les propriétés d’une substance.
69 mots, alphabétiquement distribués, comme autant de déclics de ces petites fictions où règne l’imagination en folie du jeune héros-narrateur. La plupart (54) sont des Métamots (« = mot qui a subi une transformation »), mais même quand les mots sont réels, les décoiffantes définitions chapeautant les textes sont fictives.
Le plus souvent basé à « Balbeach » (Grand-Hôtel et la fameuse « digue »), notre héros se débat (Éros + Thanatos) dans un triangle féminin dont les trois pointes sont : maman, ma grand-mère, Titine (l’ex-Albertine). Pour ne rien arranger, son désir peut aller du côté de l’hétéro- ou de l’homosexualité (Barbaqueroom, Bégayer, Bipède, Pinacothèque). Et puis il voudrait tant… écrire ! (Chalumot, Vacuhomme, Révolverbe, Dicotine). Passeront aussi quelques figures connues : Swann (Loverdose), Charlus (Aquaduc), et emblématique tripatouilleur de mots, le bouffon directeur du Grand-Hôtel (Dilsexy).
Enfin, après beaucoup d’aventures, notre narrateur-acteur conclura à sa radicale étrangeté (Zigomars), comme celle qui structure et colore ce livre, si son ancrage ou son encrage ne devait permettre à l’œil du lecteur d’accommoder.