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MURIELLE GAGNEBIN (dir.) L’ombre de l’image

De la falsification à l'infigurable

Toute image a-t-elle vraiment une ombre? À moins que l’ombre, peinte ou sonore, ne produise une image. Bref, qui, de l’image ou de l’ombre, l’emporte? Ajoutons à cela les multiples clins d’œil, les repentirs iconologiques, les astuces inhérentes au monde du spectaculaire, les présences d’absence habiles à hanter toute œuvre, qu’elle relève de la littérature, de la peinture, de la photographie, du théâtre, ou du cinéma, voire de la psychanalyse. Bref, reprises, transpositions, falsifications, recréations ou, changeons de registre: épure, conquête de l’authentique, les manifestations de l’art ont maille à partir avec l’ombreux qui vite devient tantôt ombrageux, tantôt ombrant! De même les arts de l’empreinte, depuis l’origine du dessin jusqu’à l’horreur d’Hiroshima et ses fulgurances lumineuses susceptibles d’éliminer l’image comme l’ombre, sont-ils toujours en étroite relation avec la mort et l’ineffable? Mais l’infigurable, trace de l’inhumain, ne peut-il aussi se transformer en trop de visible? Voir s’accompagnerait alors de quelque hystérie, capable de retentir sur la part de l’ombre liée à toute figure, sauf celle du vampire, et de faire des marges, des blancs, des silences autant de fragiles demeures, inséparables cependant de la représentation. Donner à voir implique ainsi sûrement un intime partage avec quelque secrète dispense des ombres. C’est ce que l’œuvre du cinéaste Alexandre Sokurov, si familier du langage pictural, confirme, au cours d’un hommage, à sept voix, rendu à son film Élégie de la traversée (2001). Le jeu énigmatique des ombres, spécifique de sa «touche» comme d’un certain traitement de la mélancolie, valorise tantôt le documentaire dans la fiction, tantôt le rêve dans la sèche réalité. La nostalgie, évocatrice de tant d’images, libère, là aussi, des ramifications propres à stimuler un nouvel art de créer, et peut-être même de penser les ombres.

Textes de Diane Arnaud, Monique Banu-Borie, Jean Breschand, Arnaud Bringer, Valérie Deshoulières, Élodie Dulac, Caroline Eades, Murielle Gagnebin, Guillaume Gomot, Steven Jaron, Gérard Leblanc, François Lecercle, Françoise Létoublon; Jean-Louis Leutrat, Suzanne Liandrat-Guigues, Nicolas Lissarrague, Julien Milly, Agnès Minazzoli, Robert Mochkovitch, Michel de M’Uzan, Georges Nivat, Bertrand Revol, Sylvie Rollet, Carole Wrona, et Alexandre Sokurov.

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L’ombre de l’image
de la falsification à l’infigurable
Le sommaire

INTRODUCTION

L’image et ses ombres: polysémie et polyvalence
par Murielle Gagnebin 7
I
L’IMAGE A-T-ELLE UNE OMBRE?

L’image n’a pas d’ombre
par Agnès Minazzoli 19

L’image est ses ombres
par Bertrand Revol 29

«Faire correspondre les ombres aux ombres»:
mythes et légendes d’ombres aux origines de la photographie
par Bruno-Nassim Aboudrar 66

Des ombres dans le ciel:
masques, poussières et matière noire
par Robert Mochkovitch 82

La Fornarina de Raphaël: une œuvre éclatée
par Murielle Gagnebin 96

II
MOBILITÉS DE L’OMBRE

Figure noire (M le Maudit de Fritz Lang)
par Guillaume Gomot 107

Un poil récalcitrant:
de Chaïm Soutine à Tex Avery
par Carole Wrona 116

L’ombre domptée:
Le Tempestaire d’Epstein
par Élodie Dulac 123

Un mirage au cinéma:
l’apparition d’Ali ibn el Kharish dans Lawrence d’Arabie
par Nicolas Lissarrague 131
III
L’ART DE L’EMPREINTE OU LES RUINES DE LA MÉMOIRE

Hiroshima mon amour ou l’empreinte pour l’ombre
par Suzanne Liandrat-Guigues 143

Quelque chose noir (et blanc):
la mémoire en ruines du moment initial (Jensen, James, Duras, Vigner)
par Valérie Deshoulières 154

Pères et fils:
le royaume des ombres chez Angelopoulos
par Caroline Eades, Françoise Létoublon, Sylvie Rollet 177
IV
LE ROYAUME DES OMBRES

L’ombre d’un spectacle tragique: sur Les Perses d’Eschyle
par François Lecercle 201
Le théâtre à l’épreuve de l’invisible
par Monique Borie 217

Ivan le Terrible:
l’ombre de l’image ou l’image retournée comme un gant
par Jean-Louis Leutrat 225
V
CHUTE DE L’OMBRE SUR L’ESPRIT

L’ombre séquestrée:
L’Heure du loup de Bergman
par Julien Milly 239

L’ombre dévorante:
l’inquiétante étrangeté des ombres dans le film noir américain
par Arnaud Bringer 253

«Morceaux de sommeil, coins»:
une réflexion autour de Paul Celan et Gisèle Celan-Lestrange
par Steven Jaron 262

Un sujet et ses «ombres»:
frayages transférentiels
ou des vertus mutatives propres au psychodrame
par Murielle Gagnebin 282

Addiction, problématique identitaire et activité créatrice:
«le tonus identitaire de base»
par Michel de M’Uzan 310

VI
DOUBLURE D’INVISIBLE
OU LES OMBRES AU TRAVAIL CHEZ ALEXANDRE SOKUROV

Sokurov ou la quête de l’envers de l’image
par Georges Nivat 321

Vague à l’âme: l’animation mélancolique
dans Élégie de la traversée d’Alexandre Sokurov
par Diane Arnaud 338

Une ombre lunaire:
à propos d’Élégie de la traversée d’Alexandre Sokurov
par Carole Wrona 354

Une ombre au tableau:
les voies silencieuses de l’incarnation
dans Élégie de la traversée d’Alexandre Sokurov
par Sylvie Rollet 362

L’ombre de l’auteur
par Gérard Leblanc 368

À l’ombre d’Éden
par Jean Breschand 372
Le Voyageur et son ombre:
Élégie de la traversée d’Alexandre Sokurov
par Jean-Louis Leutrat 378

VII
INTERVIEW D’ALEXANDRE SOKUROV
DONNÉE À GEORGES NIVAT 383

notice sur les auteurs 399

table des matiÈres 405

Ombre de l'image (L') – Murielle Gagnebin 2003